États précancéreux

Il existe des anomalies cutanées qui ne sont pas cancéreuses, mais qui peuvent le devenir: on leur donne le nom de lésions précancéreuses ou de stades précurseurs du cancer.

La kératose actinique

La kératose actinique (KA) est considérée comme une lésion pré-cancéreuse. Elle correspond au premier stade conduisant au développement d’un cancer de la peau. Bien que la majorité des KA soient bénignes, certaines études rapportent qu’environ 10% d’entre elles peuvent conduire à un cancer. Plus les kératoses actiniques sont nombreuses, plus le risque est élevé qu’une ou plusieurs d’entre elles soient à l’origine d’un cancer de la peau. Une forme particulière de kératose actinique, la chéilite actinique, se développe sur les lèvres.

Aspect des KA

Une KA, aussi appelée kératose solaire, est une petite tache rouge ou rosée, avec une petite écaille ou croûte. Elle peut apparaître sur l’ensemble du visage, les calvities, le dos des mains et des avant-bras ou sur toute autre partie du corps régulièrement exposée au soleil.

Dans un premier temps, les KA sont si petites qu’on les remarque plus au toucher qu’à la vue. Leur texture s’apparente à celle du papier de verre. Les lésions de la peau sont alors en grande partie invisibles. Les KA se développent lentement et finissent par atteindre la taille d’un demi-centimètre. Certaines vont jusqu’à former une plaque de quelques centimètres.

Si vous présentez des KA, cela signifie que votre peau a été endommagée par le soleil. Vous êtes donc susceptible de développer d’autres types de cancers de la peau.

Différentes causes de la KA

La répétition des expositions aux rayons du soleil est la cause de la majorité des KA. Les dommages provoqués par le soleil sur la peau sont cumulatifs. Les expositions brèves y contribuent également. De même, les jours nuageux ne sont pas sans risques : 70 à 80% des rayons ultra-violets (UV) émis par le soleil passent au travers de la couche nuageuse. Les rayons peuvent également être réfléchis par le sable, la neige et d’autres surfaces (eau, …), entraînant une exposition supplémentaire, que l’on a tendance à sous-estimer.

Aussi, les rayons UV des lampes à bronzer peuvent être plus dangereux que ceux du soleil. C’est pourquoi les dermatologues informent régulièrement sur les risques encourus par l’usage des cabines à UV.

Il se peut également que les KA soient induites par des expositions intenses aux rayons X, ou à certains produits chimiques industriels.

Age d’apparition

Du fait de l’effet cumulatif du temps passé à s’exposer au soleil au cours de la vie, les personnes âgées sont les plus susceptibles de développer des KA. Cependant, des sujets plus jeunes, d’une vingtaine d’années, peuvent aussi être affectés.

De plus, les patients ayant des défenses immunitaires affaiblies par une chimiothérapie, le VIH, ou ayant eu une transplantation d’organe ont plus de risques de développer des KA. Il en va de même pour les personnes s’étant trop exposées aux UV. Elles sont moins aptes à combattre les effets de ces rayons, et ont donc de plus grands risques de développer des KA.

Options thérapeutiques

Il ne nous est pas possible à l’heure actuelle de connaître à l’avance les KA susceptibles d’évoluer vers un cancer. Toutefois, nous disposons de traitements efficaces et simples d’utilisation. Bénéficier d’un traitement facilement administrable et aux effets thérapeutiques démontrés amoindrit le risque de devoir subir plus tard un traitement contre le cancer.

– Cryothérapie : cette méthode thérapeutique est la plus utilisée dans le traitement des KA, dès lors qu’il n’existe qu’un nombre limité de lésions.

– Traitement locaux : les crèmes médicamenteuses sont très efficaces. L’usage de crèmes dermatologiques est très fréquent dans le traitement des KA. Elles ont démontrées leur efficacité sur les formes établies de KA, comme sur celles non encore visibles.

Grâce à l’application d’une crème contenant du fluorouracil (Efudix) sur les zones présentant des KA, on constate qu’elles disparaissent dans plus de 90% des cas. Le traitement dure un mois.

Une crème à base d’imiquimod (Aldara) permet de stimuler le système immunitaire, afin de produire une substance (l’interféron) qui détruit les cellules cancéreuses et pré-cancéreuses. Elle s’applique pendant un mois également sur les lésions provoquées par les kératoses actiniques. Son action se prolonge autour du site d’application. Bien tolérée, elle peut cependant développer des rougeurs, de petites ulcérations ou des douleurs.

Une nouvelle molécule, le mébutate d’ingénol (Picato), s’applique une fois par jour pendant deux à trois jours, en fonction de la zone traitée

Un anti-inflammatoire, le diclofenac (Solaraze), est bien toléré, car il permet de prévenir les inflammations. Présenté sous forme de gel, il s’applique, pendant deux à trois mois, sur les zones où se trouvent les KA. Ce traitement est utilisé pour les personnes tolérant mal les autres traitements locaux.

Hormis pour le diclofénac, des rougeurs et des croûtes, parfois impressionnantes, peuvent apparaître lors des différents traitements. Mais ces effets secondaires sont temporaires et disparaissent dans les semaines suivant l’arrêt du traitement.

Ainsi, c’est en tenant compte de votre situation personnelle, des avantages et des inconvénients relatifs à chaque crème dermatologique que votre dermatologue choisira avec vous le traitement le plus adapté.

– Photothérapie dynamique (PDT) : il s’agit d’appliquer une crème qui rend les KA sensibles à la lumière. Par la suite, les lésions prétraitées sont exposées à une lumière spécifique, qui provoque l’activation de cette crème photosensibilisante. Le traitement détruit sélectivement les KA, n’entrainant que peu d’effets secondaires.

Prévention

Le meilleur moyen de se prévenir de l’apparition des KA est de se protéger des rayons du soleil.

Voici quelques conseils garantissant une bonne protection :

  • Recherchez l’ombre, tout particulièrement entre midi et 16h.
  • Ne prenez pas de coups de soleil.
  • Évitez de prendre des bains de soleil ou de fréquenter les cabines à UV.
  • Protégez-vous du soleil avec des vêtements couvrants, y compris un chapeau à bords larges et des lunettes de soleil.
  • Utilisez tous les jours une crème solaire avec un SPF (indice de protection) de 15 ou plus. Pour les activités d’extérieur, utilisez une crème solaire résistant à l’eau, avec un spectre anti-UV large et un SPF minimum de 30.
  • Appliquez l’équivalent de 2 cuillères à soupe de crème solaire sur votre corps environ 30 minutes avant de sortir dehors. Appliquez-en à nouveau toutes les 2 heures ou après un bain ou un effort physique.
  • Gardez les nouveau-nés à l’abri du soleil. Les crèmes solaires doivent être utilisées chez les bébés à partir de 6 mois.
  • Examinez votre peau de la tête aux pieds une fois par mois.

Il est également recommandé de consulter votre dermatologue une à deux fois par an, pour un bilan/examen complet de votre peau.

Grains de beauté

Un grain de beauté ou « nævus » se forme à partir de cellules normales à l’origine du bronzage de la peau, les mélanocytes, qui se mettent alors à se multiplier.

Les grains de beauté sont bénins et sans danger. Dans de rares cas, ils peuvent néanmoins évoluer en mélanome, qui est un cancer de la peau. Contrairement au naevus, le mélanome se développe à partir de mélanocytes présentant des anomalies. Le mélanome, s’il ne survient pas sur un grain de beauté déjà existant, prend souvent l’aspect banal d’un nouveau grain de beauté. C’est pourquoi il est nécessaire, dans une démarche responsable à l’égard de sa santé, de faire examiner ses grains de beauté par un dermatologue.

Les naevi sont de petites taches ou de petites lésions en relief de la peau. Ils sont de couleur brune, plus au moins foncée. Très communs, ils apparaissent sur la plupart des gens. Ils surviennent surtout lors des premières décennies de la vie, particulièrement à l’âge de la puberté.  L’exposition au soleil est la cause principale de leur origine. La grossesse est également un autre facteur favorisant leur apparition. Certains grains de beauté, généralement de plus grande taille, souvent poilus, sont des anomalies congénitales. Ils sont visibles dès la naissance.

Du point de vue purement médical, un grain de beauté n’a pas besoin d’être enlevé. Les opérations préventives, en vue d’une possible dégénérescence du naevus en mélanome sont inutiles. En effet la majorité des mélanomes se développent sur une peau normale, sans grain de beauté. Une excision chirurgicale de confort peut être envisagée, tout en sachant qu’elle laissera une cicatrice. Par ailleurs, un traumatisme (épilation, grattage, arrachement…), même répété, ne transforme pas le naevus en cancer de la peau. Ainsi, une intervention chirurgicale de confort, comme l’épilation mécanique d’un grain de beauté, peut être envisagée.

Autres états précancéreux

Diverses autres affections cutanées présentent un risque de transformation maligne. Ce risque est très variable selon le type de lésion. Les unes ne nécessitent qu’une simple surveillance, d’autres relèvent d’un traitement médical, enfin certaines doivent être prise en charge dans les meilleurs délais par une équipe spécialisée en cancérologie.

– Maladie de Bowen, érythroplasie de Queyrat (carcinomes in situ)

– Papulose bowénoïde (infection par le virus HPV à haut risque)

– Lichen scléroatrophique

– Lichen plan érosif

– Leucoplasies dont la leucoplasie verruqueuse proliférative …